Colère, nom féminin : du latin “cholera”, la bile. C’est en effet ce qui se passe, au fond du ventre, lorsque l’on se retrouve confronté·e à une injustice, une agression, l’annonce d’un énième féminicide, une insulte dans la rue, un suicide d’adelphe épuisé·e, un délit de faciès caractérisé. À la racine d’une lutte, il y a une colère sourde qui ne demande qu’à éclore.

Il y a la colère que l’on subit, celle que l’on cache, celle qui s’exprime malgré nous. Il y a des colères violentes, destructrices, et de saines colères, celles qui sont à l’origine des luttes et font bouger les lignes. Il y a les petites colères et les rages immenses. Il y a les tempêtes intimes et les bouillonnements collectifs.

Pour cette cinquième édition de Dangereuses Lectrices, nous avons décidé d’aborder le sujet de la colère, et du kaléidoscope de ses manifestations littéraires. Spontanément, la colère nous évoque un cri, des manifestations vives. Mais cette colère peut aussi être silencieuse, sourde, tapie dans l’ombre en attendant le bon moment pour se manifester. Parfois, elle a du mal à sortir, car on sait qu’une femme en colère fait mauvais genre et va à l’encontre de ce que l’on attend d’elle : rester calme et si possible plutôt silencieuse. Alors, se mettre en colère est peut-être déjà un acte militant en soi.

Et les livres dans tout ça ? Ils sont un outil d’expression de la colère, bien sûr, ils soufflent sur les braises, entretenant ainsi un feu intérieur, parfois menacé par cette fatigue militante qui n’est jamais très loin. Car la colère peut aussi être un poids si on ne sait pas ou plus où et comment la diriger. Si la colère peut sembler négative et destructrice, elle reste néanmoins un formidable moteur des luttes féministes, d’actions collectives, à l’origine de victoires passées et à venir.

Faut-il canaliser la colère ou la laisser s’exprimer ? Est-elle dangereuse ? Doit-elle s’exprimer par la violence ? Existe-t’il vraiment de bonnes colères ? Quelles sont ses représentations littéraires et que nous disent-elles ? Avec la libération de la parole vient la libération de la colère. Nous ne voulons plus rester à la place qui nous a été assignée et nous sommes prêt·es à reprendre le contrôle de notre colère en la faisant rugir. C’est ce que nous espérons faire pendant les deux jours du festival.